Entreprise

Les DRH en première ligne pour piloter la reprise

20 mai 2020

Pour limiter les risques et l’impact sur les Hommes et sur les entreprises, les dirigeants ont dû constituer des organisations de crise, occasionnant de nombreux bouleversements. Ceux-ci vont perdurer durablement, voire définitivement pour certains, avec en première ligne les DRH véritables pilotes de la sécurité des Hommes au travail.

C’est l’opportunité d’une légitimité accrue pour cette fonction, ô combien essentielle pour toute entreprise responsable.

Les DRH sur tous les fronts pendant la crise

Les DRH ont connu une surcharge d’activité en cette période de crise et une surcharge cognitive avec toute la complexité de la gestion à distance, de sujets complexes et graves. Si leur sentiment d’utilité en a été renforcé, cette période intense les a aussi épuisés.

Comprendre et mettre en place de nouvelles règles, souvent peu précises, pour faire face à des situations de travail inédites

Que l’activité de travail ait pu se poursuivre ou non, les mesures associées au confinement (télétravail, chômage partiel, droit de retrait etc.) ont dû s’élaborer en urgence et sur des volumes d’effectifs conséquents : ainsi, en raison du confinement, la proportion de télétravailleurs est passée de 7 % à 30 % de la population active[1] et [2] sur la période. Comme les entreprises n’étaient pas toutes prêtes, 46% des DRH ont fait face à un manque de matériel, 58% ont dû adapter les outils d’échange à distance et 38% ont dû accompagner les managers et les salariés dans la prise en charge de ces nouveaux outils[3].

L’évolution du cadre légal et le décalage temporel avec les décrets d’application ont nécessité une veille législative accrue et d’inévitables ajustements successifs, quelques fois contradictoires, afin de se conformer à la loi. Dans cette période troublée, 71% des responsables RH [4] indiquent avoir été mis en difficulté pour suivre les évolution règlementaires.

Lorsque les activités de production ont pu se poursuivre, se sont alors cumulées l’organisation des mesures de protection physiques des salariés (mise en place des gestes barrières) et la gestion de l’absentéisme massif (maladie, garde d’enfants).

Chargés d’orchestrer les changements structurels des modes de travail, en mode d’hyper réactivité, les DRH, dans ce contexte singulier, ont dû mettre en place de nouvelles formes de dialogue social, sur des sujets qui ne faisaient jusque-là pas ou peu partie de l’agenda social :

  • Avec les directions générales : mise en place de cellules de crise, plan de continuité de l’activité (PCA)
  • Avec les instances représentatives du personnel, pour poursuivre l’indispensable dialogue social et permettre la mise en place des changements. Il a souvent fallu d’abord (r)établir une relation de confiance sereine, pour ensuite pouvoir inventer ensemble de nouvelles façons de travailler, en dehors du cadre formel habituel.

Une suractivité qui s’est ajoutée aux tâches plus classiques

Les services DRH, ont dû, en parallèle continuer à gérer la paie (avec toutes les difficultés de calculs en cas de chômage partiel), les recrutements en cours, l’administration du personnel (chèques déjeuners, etc.).

Au-delà de la fatigue physique occasionnée par la charge de travail, s’est ajoutée une très grande surcharge cognitive et émotionnelle :

  • Le fait que chacune des actions mises en place ait un impact direct sur les Hommes et sur la survie de l’entreprise a induit une très forte pression. A cela s’est ajouté la multiplicité et la nouveauté de certains sujets : l’incertitude, la complexité, la détresse psychologique des personnes isolées, la peur d’aller travailler et de contaminer sa famille au retour à la maison, la peur de perdre leur emploi pour d’autres.
  • Les changements profonds de paradigmes dans tous les domaines économiques, sociaux, sociétaux.

Il ne faut pas oublier que gérer l’humain au travail implique aussi de faire face à des situations dramatiques : salariés malades ou décédés, demandes administratives des familles, des conjoints.

Face à l’ensemble de ces défis, les DRH et leurs équipes ont répondu présents. Ils ont mis de côté leur propre inquiétude pour leur santé, celle de leurs proches, donnant sans compter de leur temps et d’eux-mêmes (stress, sommeil), souvent au détriment du temps consacré à leur famille.

Les DRH au cœur de la réflexion pour repenser l’organisation

Le temps de l’urgence est à peine passé, que s’annoncent déjà avec la question du déconfinement, de nouveaux sujets pour les DRH :

  • Participer à l’état des lieux des ressources disponibles et les besoins éventuels en renfort de personnel
  • Sortir les salariés du chômage partiel
  • Poursuivre les aménagements permettant l’application des mesures de prévention et se dire qu’il va falloir vivre avec ce virus et donc installer ces aménagements du travail dans la durée
  • Redonner envie de venir retravailler. Vérifier le niveau d’engagement de collaborateurs usés par près de 3 mois de confinement
  • Soutenir les managers pour les aider à reprendre contact, à manager à distance et informer les équipes le plus en amont possible concernant les conditions et les modalités de reprise d’activité envisagée ; organisation du travail, horaires, mesures de prévention, etc.
  • Accompagner la mise en place des retours d’expérience (REX) avec les managers : anticiper la planification en amont, organiser le suivi et centraliser l’information. Il s’agit de permettre à l’entreprise de capitaliser sur les retours d’expérience des équipes et ainsi réformer l’organisation.
  • Poursuivre les transformations qui étaient engagées avant la crise

Nous avons constaté l’importance du couple DG-DRH pour prendre les bonnes décisions rapidement. Cette crise a jeté un coup de projecteur sur la place centrale des DRH – et leurs équipes – dans l’entreprise et renforce leur légitimité.  Ils sont les maîtres du facteur humain (complexe, incertain, divers, changeant, émotif…) qu’ils ont souvent du mal à mettre en avant et pour une fois, c’est bien l’être humain qui a été priorisé (Pourquoi ne pas utiliser le bilan social individuel ?).  Leur expertise a été hautement sollicitée. Leur réflexion doit être entendue au plus haut niveau.

Dans cette période inédite pendant laquelle les priorités se percutent, les dirigeants doivent aussi prendre le temps de reconnaître le travail fourni et l’implication et des responsables RH et de leurs équipes. Il faudra savoir les remercier.

C’est l’opportunité de regarder sous un autre angle la place de l’Homme au travail et de remettre la fonction Ressources Humaines comme un des éléments prioritaires du COMEX ou du CODIR pour impulser les nouvelles dynamiques organisationnelles.

[1] Ségolène Journoud, responsable du département Transfert à l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) -L’humanité 28/04/2020 [2] https://www.anact.fr/outils/un-kit-pour-associer-teletravail-et-qvt [3] Enquête réalisée du 26 mars au 6 avril 2020 auprès de 550 répondants, adhérents de l’association nationale des DRH (ANDRH) [4] Selon le baromètre Tissot publié dans « les échos exécutives » du 16/04/2020
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